
Il existe déjà des initiatives de soins intégrés dans notre pays, notamment sous la forme de projets pilotes, tant au niveau de l'État fédéral que des entités fédérées. Par ailleurs, les soins intégrés recouvrent de nombreux secteurs qui ont souvent aussi leurs propres plans et réformes politiques, remarque le KCE qui souligne, dans son étude, qu'au terme du processus de consultation avec les acteurs de terrain trois priorités ont été dégagées.
En premier lieu, il est nécessaire de définir un cadre politique clair. Les parties prenantes en appellent à un accord de collaboration interfédéral dans lequel tous les nive aux de pouvoir coordonneraient leurs différentes initiatives et définiraient ensemble les réformes et autres initiatives qu'ils souhaitent mettre en œuvre.
Un Plan interfédéral sur les Soins intégrés est développé actuellement par l'INAMI, le SPF Santé publique et le cabinet du Ministre Vandenbroucke, avec la contribution des entités fédérées et l'aide du consortium WeCare. Cette consolidation des initiatives doit servir de tremplin pour la transition vers une approche plus intégrée des soins, une transition largement soutenue, tant par les autorités que par les acteurs des soins et du social.
La sortie du Plan interfédéral Soins intégrés est attendue début 2024.
En second lieu, les participants sont globalement d'accord pour dire que le développement des soins intégrés en Belgique doit se faire selon une approche territoriale. Cela permet de bien cerner les besoins de la population bénéficiaire (approche populationnelle) et d'identifier les partenaires avec lesquels on peut collaborer. La plupart des initiatives et réformes des soins de santé citées plus haut reposent déjà sur une base territoriale, et il en va de même dans le secteur social et de l'aide à la personne. Le problème est ici encore que ces différentes zones géographiques sont difficilement articulables entre elles.
Plusieurs questions doivent donc être résolues au niveau politique avant de pouvoir aller plus avant: comment aligner les différentes approches territoriales existantes ? Quelle est la taille optimale d'un territoire ? Comment chaque territoire doit-il être géré ? Aucune réponse claire et nette ne ressort de l'étude, chaque approche présentant ses propres avantages et inconvénients.
Une chose est cependant certaine: quel(s) que soi(en)t le(s) niveau(x) choisi(s), il sera indispensable d'y renforcer la première ligne de soins et la collaboration entre intervenants. Ce maillage multidisciplinaire autour du patient devrait idéalement inclure des acteurs de la santé préventive, somatique et mentale, du secteur social et de l'aide à la personne, tant en ambulatoire qu'au niveau hospitalier. Une telle évolution passe nécessairement par l'utilisation d'outils numériques communs, par exemple en facilitant l'accès des uns et des autres aux informations pertinentes, en rémunérant les temps de coordination, etc.
La troisième priorité est une réforme du système de financement des soins, qui est actuellement principalement basé sur le volume de soins prestés (paiement à l'acte). Un tel système est en effet considéré comme l'un des principaux obstacles à l'intégration des soins, car il ne comporte pas suffisamment d'incitations à la collaboration, à la coordination et à la prévention. Il faudrait idéalement tendre vers un modèle de financement mixte, avec, à côté des paiements à l'acte, une part de financements alternatifs (p. ex. forfaitaires) non directement liés au nombre de prestations, ainsi que des incitants à la qualité ;. Les récentes réformes politiques vont déjà dans ce sens, par exemple la réforme du financement des hôpitaux, qui comprend des premiers pas vers des paiements groupés visant à renforcer la continuité des soins et à décourager les tests et examens redondants. Autre piste intéressante à suivre : les discussions actuelles autour du New Deal pour la médecine générale.
Si le passage à des soins (plus) intégrés devrait en théorie mener à terme à un retour sur investissement (p. ex. renforcer la prévention peut réduire à long terme les coûts des soins curatifs), il est illusoire de penser que renforcer la multidisciplinarité, soutenir la 1e ligne et réformer le système de financement puisse être neutre à court terme pour le budget des soins de santé. Au contraire, avertissent les chercheurs, il faudra probablement prévoir un investissement initial substantiel, conclut le KCE.
Source: Belga