
À quelques jours d'une réunion extraordinaire des ministres européens de l'Énergie (9 septembre), le président du Conseil européen semble vouloir accentuer la pression sur la Commission, pour qu'elle sorte de son chapeau exécutif des pistes concrètes et formelles pour enrayer la hausse des prix de l'énergie. "Nous avons besoin en extrême urgence de propositions concrètes", répète Charles Michel vendredi, lors d'un entretien organisé avec des médias belges. L'ex-Premier ministre "espère" de premières décisions en septembre, et mettra l'énergie à l'agenda du prochain sommet prévu, les 6-7 octobre.
Fin août, la pré sidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a fait sa rentrée en annonçant préparer "une intervention d'urgence et une réforme structurelle du marché de l'électricité". Depuis, des notes préparatoires de la Commission (des "non papers") fuitent vers la presse. On y parle de plafonner les profits des producteurs d'électricité qui ne fonctionnent pas au gaz, en leur imposant un prix de gros maximum, comme l'ont révélé jeudi les agences Reuters et DPA, et l'AFP vendredi. La Commission préconiserait aussi des tarifs réglementés ciblés sur les consommateurs dans le besoin.
Ces notes restent cependant des propositions informelles. "On ne peut pas attendre le State of the Union (le discours sur l'état de l'Union de la présidente de la Commission, prévu le 14 septembre à Strasbourg, NDLR)", prévient Charles Michel vendredi, constatant un sentiment "d'impatience", dit-il, parmi les chefs d'Etat et de gouvernement.
Le Belge a ses idées: il faut aller "plus loin" dans l'action commune sur la demande, par exemple. Les Etats membres se sont engagés collectivement à tenter de faire baisser leur consommation de gaz (de 15%) cet hiver, mais il "serait utile d'avoir aussi des recommandations en termes (d'économies) d'électricité". Il faudrait aussi avancer sur un éventuel plafonnement des prix, qui peut prendre différentes formes, et entrer dans le concret pour réformer, le cas échéant, le marché de l'électricité. Le mécanisme qui détermine le prix de l'électricité, basé sur la dernière unité de production nécessaire pour rép ondre à la demande (souvent une centrale au gaz), est sur toutes les lèvres actuellement. "Nous sommes dans un cercle vicieux qu'il faut briser", tout en se méfiant, vu la technicité du sujet, des solutions toutes faites (on peut "s'inspirer" de la solution de l'Espagne et du Portugal, mais "ce n'est pas si simple"), dit-il en substance.
S'il n'y avait pas de consensus entre les 27 à ce sujet ces derniers mois, admet Charles Michel, les lignes bougent. Les Etats prompts à crier "pas touche à mon mix énergétique" se tournent désormais vers l'Europe pour des pistes de convergence, "un peu comme avec la santé lors de la crise Covid", observe le président du Conseil européen. Entre-temps, les Etats "s'appauvrissent" en mobilisant des moyens pour atténuer les effets de la crise énergétique sur leurs citoyens et entreprises: "déjà 280 milliards selon l'institut Bruegel!" (think tank économique, NDLR).
L'Europe n'est pas restée les bras ballants (stockage du gaz, engagement d'une baisse de la consommation, etc.), mais Charles Michel émet quelques regrets. Les résultats non "satisfaisants" de la création d'une plateforme européenne d'achats groupés de ressources énergétiques en font partie. "On voit un paradoxe entre d'une part les décisions au niveau européen et d'autre part un certain nombre d'Etats membres qui, de manière bilatérale, engagent des discussions avec des pays producteurs. Cela a un effet inverse à l'effet souhaité, puisque cette démarche contribue plutôt à faire monter les prix. On n'évitera pas un débat sérieux &agra ve; ce sujet, entre chefs d'Etat et de gouvernement, au plus tard en octobre", indique-t-il. L'exemple le plus parlant est celui de la Hongrie, qui a négocié et annoncé récemment un nouvel accord avec Gazprom, ce même géant étatique russe qui a coupé ses approvisionnements à plusieurs autres pays européens.
Source Belga